Félix (Maurice Yves) VALLAT

Pionnier de l’écotourisme en Namibie

« Je pensais être né trop tard pour découvrir un territoire inexploré. »
« Je pensais être né trop tard pour découvrir un territoire inexploré. »

Spécialiste francophone de la préservation de l’environnement et des Conservatoires communautaires en Namibie depuis 2004, Félix Vallat a accompagné en tant que guide naturaliste des reporters et des équipes de tournage de France 2, Voyage et Ushuaia TV.

 

Déjà en 2001, pionnier, écologique et solidaire, les valeurs phares de ses choix professionnels et de son chemin de vie, il ralliait Paris à Dakar en triplette, un vélo trois places, avec deux de ses collègues d’étude soutenus par leur école 3 A ainsi que par la communauté Pied-noir. Un voyage qui n’avait encore jamais été accompli.

 

 

 

Félix,  né le 10 novembre 1980 à Lavaur, dans le Tarn,  a hérité du prénom familial qui se transmet de génération en génération à l’aîné des garçons Vallat. Une tradition qui peut sembler difficile à assumer quand on est un tout jeune homme, dominé par le sentiment de devoir se surpasser pour être à la hauteur de ce grand-père portant la même identité, figure de héros,  Félix Vallat, maire de Thiersville, en Oranie, assassiné par le FLN le 8 avril 1958 avec son épouse[i] , dont le charisme et l’œuvre exceptionnelle ont causé sa perte.

 

Il tient de sa famille –parents, grands-parents -, exilés d’Algérie,  cette impalpable sensation d’être, comme ils disent,  « sans racine », « ici, c’est pas chez nous ».  Est-ce la raison qui le pousse au voyage ?  En effet, le jeune Félix Vallat a toujours ressenti un irrépressible besoin de large et d’horizons lointains.

 

Sac à dos, il  a alors très tôt flirté avec les continents (Australie, Amérique du Sud, Asie du Sud-est…) jusqu’à cette année 2004, en mai, où il décide de ne plus jouer au touriste mais de trouver un job quelque part, loin, « sans piston », et de s’y fixer afin de mieux connaître le pays qui l’accueillera et de « se faire à 100%,  à neuf ». Il termine ses études de commerce et développement à l’École des 3 A pour qui la géopolitique, les langues, le développement durable, l’économie sociale et solidaire, l’anthropologie, la responsabilité sociale sont dominantes. Un stage de six mois en Namibie proposé par une petite annonce va décider de son destin. Treize ans plus tard, il y vit toujours et n’est pas prêt d’en repartir !

 



[i] « Le rêve assassiné » de Maïa Alonso (Atlantis, 2017)

 

 

 

L’Afrique Australe, c’est le choc de la rencontre avec des paysages vertigineux, sans clôture, où la propriété privée n’existe même pas dans certaines régions. C’est aussi pour Félix, la découverte d’une culture plurielle, de populations dures mais attachantes et d’une faune prodigieuse. Tous les éléments voulus sont  réunis pour séduire le jeune homme : « Simple, beau et brut », dit-il. Il s’y sent étrangement « chez lui » et c’est la première fois, comme s’il revenait sur sa terre alors qu’il ne l’a jamais connue !

 

 La Namibie est un pays pionnier, modèle dont s’inspirent d’autres pays en termes de politique en faveur de la protection du patrimoine naturel. Et pour Félix, ce pays où tout est à construire, c’est le défi qu’il cherchait à relever. Il va s’immerger en milieu sauvage, développer les échanges culturels tout en recherchant un impact environnemental minimum et positif.

 

En 2013, installé à Windhoek, la capitale,  il devient « artisan du voyage » et monte son entreprise « Ecosafaris » qui a pour but de faire découvrir la Namibie tout en la préservant.  Une équipe l’accompagne ponctuellement.  Ecosafaris propose au voyageur de l’emmener au cœur d’une terre sauvage. Marche à pied, virée en 4x4, initiation à la faune et à la flore… Félix a treize années d’expérience dans ce domaine qu’il maitrise parfaitement. Ce qui lui tient le plus à cœur, c’est la coexistence pacifique entre les populations locales et les animaux sauvages, en dehors des parcs nationaux : « Il faut protéger les bêtes sauvages qui disparaissent partout ailleurs. Or elles sont l’atout majeur du tourisme et par un juste retour des choses, cela assure leur protection. Donc nous aidons ceux qui les étudient et ceux qui doivent vivre dans le même environnement. Les namibiens ruraux, souvent désavantagés, paient le prix fort de cette cohabitation,, sans en bénéficier. Le tourisme est un outil qui doit les soutenir. » D’où la co-fondation en 2012 de TOSCO (Tourism Supporting Conservation), une organisation namibienne à but non lucratif unissant les acteurs du tourisme afin de soutenir la préservation de l’environnement et ceux qui cohabitent avec les grands prédateurs. TOSCO aide les scientifiques chargés de gérer cette cohabitation, en localisant les fauves  afin d’anticiper les conflits.  Félix innove dans ce tourisme responsable : « C’est pour cette raison aussi qu’Ecosafaris soutient les Conservatoires  Communautaires, ces terres riches en animaux sauvages où vivent des populations Himbas et Hereros. Rencontrer ces habitants et partager leur expérience de la conservation communautaire est possible si les voyageurs adoptent la bonne approche ».

 

Le voici donc guide naturaliste : toute la faune le passionne du lion du désert aux geckos palmés, sans oublier le monde des oiseaux… ou celui des reptiles ! Déjà adolescent, il avait adopté une couleuvre.  C’est la méconnaissance des serpents qui alimente la peur des habitants. Alors il va s’engager dans la sauvegarde des reptiles en créant une association en 2016 SCAN (Snake conservation association of Namibia) qui a pour mission l’étude et la protection des serpents mal ou peu connus mais qui fascinent : « Un permis du Ministère de l’Environnement et du tourisme me permet de gérer les conflits entre hommes et reptiles ». La connaissance étant le meilleur antidote à la peur,  il organise des sessions pour familiariser les namibiens à cette vie rampante. Mais il faut rester vigilant car certains sont effectivement dangereux, comme les cobras et les mambas. En 2017, Félix va lui-même en faire les frais : il reçoit du venin dans l’œil mais heureusement, plus de peur que de mal, l’œil guérissant en une semaine.  Quand une de ces bêtes s’introduit dans un domicile, Félix intervient, la récupère pour la rendre à son environnement. C’est l’occasion pour lui , de relever un certain nombre de données permettant d’améliorer l’état de connaissances des espèces et de leurs habitudes.  : « Les reptiles sont utiles à l’écosystème.  Ils régulent notamment la population des rongeurs. Tout ceci m’a permis de tisser des liens privilégiés avec les scientifiques et les populations locales. C’est avec eux que j’ai développé les Ecosafaris et la charte du Tourisme responsable sur les terres communales ». Les touristes bénéficient  de la qualité de ces expériences.

 

Tous ses engagements sur le terrain ont permis d’identifier trois besoins prioritaires : gérer les conflits entre les habitants et la faune sauvage avec la mise en place d’enclos anti prédateurs ou d’enceintes qui protègent les points d’eau ; impliquer les habitants dans la lutte anti-braconnage et dans l’identification des espèces ; effectuer le recensement annuel des animaux hors parcs nationaux pour une meilleur gestion de la faune.

 

Clémentine est arrivée.

 

 

En 2009, une jeune enseignante en français, originaire de la Lozère, arrive en Namibie.  Elle vient pour un stage de six mois. Aujourd’hui elle est directrice départementale linguistique de son école dans la capitale. Elle enseigne aux élèves de la quatrième à la terminale, les initie au théâtre, au chant chorale, tout en étant institutrice des Duke of Edimburgh’s Award, un équivalent anglais du scoutisme.

 

Partageant désormais la vie de Félix, ils ont deux petites filles de 3 et 6 ans, Lise-Iyalo et Matilde-Félice,  de véritables namibiennes, familiarisées avec la faune… et même les reptiles !

(10 janvier 2018)

 

En savoir plus...

Consultez le site Ecosafaris : www.ecosafaris.com/safaris-en-namibie/


Association SCAN sur Facebook : https://www.facebook.com/groups/187156948143224/about/

Bulletin MAFA n° 165 sortie mi janvier 2018